Qualité de vie au travail et législation
En France, assurer le bien-être de ses salariés au travail, n’est pas un dispositif optionnel, mais une obligation légale pour les entreprises.
Le Code du travail établit des règles et des normes pour les conditions de travail, notamment en matière de santé et sécurité, de durée du travail, de repos et de congés, ainsi que de représentation du personnel.
La Loi sur la modernisation du dialogue social (2015) a introduit le concept de « qualité de vie au travail » dans le Code du travail, et a rendu obligatoire la négociation annuelle sur la QVT dans les entreprises de plus de 50 salariés.
Les Accords Nationaux Interprofessionnels (ANI), conclus entre les organisations syndicales et patronales, abordent la QVT et donnent des orientations pour les négociations en entreprise.
ANI : L’historique
Une enquête sur les conditions de travail mandatée en 2013 par la DARES avait mis en évidence l’intensification du travail entre 2005 et 2013.
Cette intensification du travail s’expliquait (encore aujourd’hui) par les nombreux changements organisationnels liés :
- à la modernisation technologique (ERP, GED, intranet, digitalisation, etc.)
- aux innovations organisationnelles (flux tendu, ISO, Lean, etc.)
- à la transformation des structures (réduction des strates hiérarchiques, organisations matricielles, fusions entre back et front office, centres de services partagés, appel à la sous-traitance, etc.)
- à l’outillage gestionnaire et managérial (reporting, pilotage par les objectifs, approche client
C’est ce contexte qui a conduit aux négociations sur la Qualité de Vie au Travail et à la signature de l’Accord National Interprofessionnel (ANI) du 19 juin 2013 sur la QVT.
Le 9 décembre 2020, un nouvel ANI a été signé, intégrant les conditions de travail (la QVT devenant la QVCT).
Les différences entre QVT (Qualité de Vie au Travail) et QVCT (Qualité de Vie et Conditions de Travail)
La QVCT reprend les fondamentaux de la QVT, tout en en évitant les écueils constatés depuis 2013 (la QVT se résumait parfois à des aménagements superficiels d’espaces de well being avec babyfoot, fauteuils relaxants, conciergerie, salles de gym à l’intérieur de l’entreprise…).
Avec la QVCT, la qualité de vie au travail tourne autour des conditions de travail et de la possibilité de faire du travail, qui ait du sens, dans une bonne ambiance.
L’organisation de travail doit être favorable à la performance de l’entreprise mais aussi à la santé des personnes.
C’est pourquoi la conciliation des temps de vie perso et pro, l’égalité professionnelle, les conditions d’exercice du travail (management, moyens, télétravail, charge de travail, autonomie, coopération etc…) et l’expression des salariés font partie des thèmes de la QVCT.
Le rôle des organisations syndicales en matière de QVCT
Au travers des CSSCT
Dans les entreprises de plus de 11 salariés, un Comité Social et Economique (CSE) doit être mis en place. Sa mission est de veiller à la protection de la santé, de la sécurité et des conditions de travail des salariés.
Par délégation du CSE, la CSSCT (Commission Santé Sécurité et Conditions de Travail) exerce tout ou partie des attributions du CSE concernant la santé, à la sécurité et les conditions de travail.
Les organisations syndicales qui composent le CSE sont donc partie prenante dans l’amélioration de la QVCT.
Au travers des négociations des accords
La loi santé au travail du 2 août 2021 complète les dispositions relatives à la négociation annuelle sur l’égalité professionnelle et la qualité de vie au travail. Elle peut désormais porter également sur la qualité des conditions de travail.
Chez Schneider Electric, un accord spécifique QVCT est donc négocié par les organisations syndicales tous les 4 ans (le dernier date de juillet 2022). Une Commission de suivi se réunit chaque année pour discuter avec la Direction de l’application de l’Accord.
La Cfdt a activement participé à la négociation du dernier accord. Vous retrouverez dans ce tract nos revendications et les réponses de la Direction.
Les thèmes QVCT chers à la CFDT
Flex office
La généralisation des « open space » ou grands espaces de travail collectifs, peut conduire à des risques psychosociaux :
- Sensation de ne plus faire partie d’une équipe, d’être moins important pour la société, d’être interchangeable conduisant à l’isolement du salarié (on peut être malade chez soi personne ne le remarque) par la perte de personnalisation de son propre espace
- Exposition continue au bruit et au regard des autres
- Stress de trouver une place (et un parking) en arrivant au travail, ajouté au stress des transports
Le manque de repères et la déshumanisation liée à cette pratique qu’est le flex office (associé au télétravail et au nomadisme mais aussi à la volonté d’optimiser les m²) peut avoir, pour certains, des conséquences négatives sur l’équilibre de la personne.
Tout le monde est impacté, et le manager n’est pas épargné puisque c’est sur lui que repose la responsabilité de fixer les jours de présence sur le site ou en télétravail des membres de son équipe.
La Cfdt est sensible à ce sujet qui mérite toute notre attention. Par le biais des CSSCT, nous voulons pouvoir aider à prévenir les dérives liées à ces nouveaux modes de travail.
Télétravail
Le télétravail est aujourd’hui plébiscité par de nombreux salariés, apportant en particulier ces avantages :
- une plus grande liberté, avec la possibilité de s’organiser à sa guise, en toute autonomie
- moins de temps perdu dans les trajets
Quant à l’entreprise, les gains de productivité peuvent être énormes et l’empreinte carbone valorisée.
L’entreprise a évolué et s’est adaptée sur des sujets que nous avions pointés du doigt en 2021*, mais, l’entreprise n’est pas toujours très flexible pour adapter le télétravail en fonction des besoins / contraintes de chacun. Et il reste des sujets à approfondir :
- comment gérer à distance ses équipes, éviter l’isolement et préserver le sentiment d’appartenance à l’entreprise ?
- comment revoir l’organisation du travail dans le temps (la journée de travail avec des heures fixes est-elle morte) ?
- comment déterminer les plages horaires pour préserver sa vie privée et borner la prise en charge d’un éventuel accident de travail ?
- Quelles modalités de régulation de la charge de travail ? Comment garantir des temps de repos avec les 11h minimum consécutives ?
Il reste des marges de progrès que la Cfdt souhaite pousser, pour que le télétravail puisse se faire dans les meilleures conditions possibles.
Droit à la déconnexion
L’utilisation des PC portables et des smartphones donne au salarié plus d’autonomie et de souplesse dans l’organisation de son temps de travail, mais il est de la responsabilité de l’employeur de
- Faire respecter les durées maximales de travail
- Garantir le temps de repos
- Réguler la charge de travail
- Éviter le risque de burn-out
- Respecter la vie privée du salarié
L’Accord de Schneider Electric reste très frileux sur les mesures à mettre en place pour que la déconnexion puisse s’exercer.
Des mesures « radicales » auraient pu être expérimentées (déconnexion automatique ou contrôle des temps de connexion par exemple…).
L’évaluation de la charge de travail aurait pu être lancée systématiquement. Ce n’est pas le choix qu’a fait Schneider, qui préfère laisser la responsabilité de cette évaluation au salarié lui-même et à son manager. La Cfdt continuera à peser pour que des outils soient mis en œuvre et que le droit à la déconnexion soit une réalité.
Conditions de travail des personnels de production
Ces dernières années, on a pu constater :
- L’apparition d’automates et de nouvelles technologies au sein des usines, impliquant des opérations plus complexes, sans qu’une formation ait été mise en place
- Le déplacement de postes d’atelier vers des occupations liées à l’entretien ou au contrôle des machines
- Les tâches, qui demandent une plus grande attention, sont devenues plus intenses.
Les exigences ont augmenté (mais pas les salaires…) avec des objectifs revus à la hausse. D’autant plus que les contraintes liées à une activité variable (pics d’activité, pénurie de composants), les normes et les délais ont exigé plus de flexibilité pour atteindre les objectifs de production et ont pesé sur le volume de travail et la cadence imposée, conduisant à un recours à l’intérim massif.
Vos représentants Cfdt vivent avec vous cette transformation du travail en usine de production (avec un engagement plus contraignant et un travail plus intense.) Avec le collectif Cfdt, ils agissent dans les instances et les négociations, pour faire valoir le point de vue de salariés vis-à-vis de la direction.
Réorganisations, délocalisations, mobilités et souffrance au travail
Avec
- Les réorganisations (qui parfois se font dans l’opacité)
- Les délocalisations
- Les postes supprimés
- Les fermetures de site
les mobilités se poursuivent, augmentant la pression sur les salariés, et notamment sur les séniors.
L’incertitude, génératrice de stress, peut créer un climat professionnel anxiogène.
La souffrance au travail existe, même si elle n’est pas toujours visible. Les EvRP RPS (EValuation des Risques Professionnels en matière de Risques Psycho-Sociaux) sont aujourd’hui beaucoup plus largement réalisés, mais c’est la moyenne des notes de chacun qui sera prise en compte pour savoir s’il faut ou pas, mettre le service concerné « sous surveillance ». Des moyennes trop peu représentatives de l’état du service, l’écart type des notes ainsi que le taux d’absentéisme devrait être réellement pris en compte selon la Cfdt…
Les résultats sont également difficilement exploitables par vos représentants du personnel car :
- Les verbatims ne sont pas toujours transmis
- Les périmètres et les plans d’actions sont souvent opaques
La Direction a travaillé sur les EVRP RPS mais il reste du chemin à accomplir et la transparence devrait être de rigueur.
POUR CONCLURE
La santé au travail est depuis toujours Un sujet essentiel pour la Cfdt.
Nous défendons une organisation permettant au travail de se faire dans des conditions satisfaisantes, plutôt qu’une approche corrective ou réparatrice des problèmes nés du travail.
Notre volonté est (et a toujours été) de tourner davantage notre système de santé au travail vers la prévention primaire, c’est-à-dire d’agir en amont, notamment sur la qualité de vie au travail et les réalités du travail.
Depuis plusieurs années, les entreprises se transforment pour répondre aux enjeux des différentes transitions en cours (numériques, écologiques, sociétales…). Pour la CFDT, faire le lien entre ces transitions et la QVCT est indispensable.
Notre action doit donc être en résonance avec ces transformations, qui génèrent des risques psycho-sociaux. L’enquête Kantar du 23 juin 2023 sur les cadres et la QVCT donne un éclairage précieux sur les difficultés que rencontrent les salariés (qu’ils soient cadres ou pas), et sur les points essentiels à traiter (charge de travail et prévention des RPS en particulier), notamment lors des négociations ou en CSSCT.
Vous pouvez aller plus loin avec ces articles :